27 Octobre 2009
Une réforme de la Constitution votée à l’Assemblée nationale garantirait une totale protection du secret des sources, mais la dépénalisation des délits de presse attend toujours son approbation. Les médias font les frais d’un regain de violence depuis 2007.
Une trentaine de journalistes ont été les cibles d’agressions ou d’attentats au cours de l’année 2008, et une vingtaine ont fait l’objet de procédures judiciaires souvent abusives. Ce bilan, dressé par la Collège dominicain des journalistes (CDP) et le Syndicat national des travailleurs de la presse (SNTP), ressemble hélas à celui de l’année précédente. Les attaques contre les médias ont alors connu un niveau jamais atteint depuis l’époque de la dictature de Joaquín Balaguer, dans les années 70.
Destination touristique prisée, la République dominicaine reste également sujette à une corruption tenace et sa position géographique en fait un important point de passage du trafic de drogue. Gare aux médias qui se mêleraient d’un peu trop près de ce type d’affaires, d’autant que les représailles sont souvent le fait de fonctionnaires municipaux ou de policiers. Cette situation explique d’ailleurs le peu de célérité de la justice à mettre un terme à l’impunité. La défiance entre la presse et les autorités s’est encore accentuée depuis l’assassinat, toujours en attente d’élucidation, de Normando García, cameraman et producteur de la chaîne privée régionale Teleunión, le 7 août 2008 à Santiago de los Caballeros. Particulièrement prégnante, la menace des cartels de la drogue contre les journalistes peut venir de n’importe où. Journaliste et producteur d’émissions pour la chaîne privée Canal 10-Varo Visión et la station 95,5 FM dans la province de Hato Mayor, Manuel Vega a ainsi reçu des « avertissements » attribués à deux narcotrafiquants emprisonnés au début de l’année 2009. La pression peut également émaner des plus hautes instances dirigeantes, comme l’ont révélé les manœuvres d’intimidation exercées par l’entourage du sénateur Alejandro Williams contre trois journalistes, depuis sa mise en cause dans une affaire de fraude au Medicare américain. L’affaire a tourné au scandale lorsque Margarita Cordero, du journal en ligne 7Días, María Isabel Soldevilla, du quotidien Listín Diario et Norma Sheppard, de la station privée Radio Mil, ont raconté à la commission d’éthique de la Haute Assemblée que des gardes du corps du sénateur s’étaient fait passer devant elles pour des agents du FBI afin d’obtenir les noms de leurs sources. L’épisode a cependant précédé de peu le vote par l’Assemblée nationale, le 4 mai 2009, d’une réforme constitutionnelle garantissant la protection absolue du secret des sources. Cette avancée reste en deçà des espoirs des représentants de la profession, qui ont réitéré leur appel à la dépénalisation des délits de presse. Déposée en septembre 2007 à l’Assemblée nationale, une proposition de loi en ce sens n’a toujours pas été examinée.